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Fiscalité des revenus et plus-values de brevets et logiciels : de nouvelles opportunités… et quelques contraintes !

Depuis plusieurs décennies, la France applique un régime fiscal de faveur aux revenus de licence et plus-values de cession des brevets et certains autres actifs incorporels. Ce régime a fait l’objet d’une réforme dans la dernière loi de finances afin de le mettre en conformité avec les normes communautaires et OCDE et est désormais codifié à l’article 238 du Code Général des Impôts, applicable aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019.

Le nouveau régime abaisse le taux d’IS afférent aux revenus et plus-values éligibles de 15 à 10%. Sous conditions, il s’applique également aux revenus de sous-concessions. En termes de périmètre d’actifs éligibles, il vise toujours les brevets, mais également désormais les certificats d’utilité et surtout les logiciels originaux protégés par droit d’auteur. En revanche, il n’est plus ouvert aux inventions brevetables, sauf celles faisant l’objet d’une certification de brevetabilité par l’INPI par une PME. Tout comme auparavant, en cas d’actif acheté et non développé en propre, un délai de 2 ans doit s’écouler avant de pouvoir revendiquer le nouveau régime.

Afin de bénéficier de ce taux réduit, plusieurs nouvelles conditions sont à respecter et à anticiper :

  • Les dépenses liées directement aux actifs éligibles sont désormais à déduire du revenu soumis au taux réduit, obligeant à suivre ces dépenses et à créer deux « silos » de revenu fiscal, l’un taxé au taux plein, l’autre au taux réduit ;
  • Le revenu soumis au taux réduit est soumis à un ratio dit « Nexus », d’autant plus faible que les dépenses de R&D sont sous-traitées à une société liée ou que des dépenses d’acquisition et non de développement sont exposées par l’entreprise ;
  • Le nouveau régime est optionnel, et cette option peut être globale ou porter sur certains actifs ou produits, ou familles d’actifs ou de produits ;
    • De nouvelles obligations documentaires et des règles spécifiques en intégration fiscale ou suite à des restructurations internes s’appliquent.

De nombreuses interrogations demeurent, et un projet de BOFIP circule déjà pour fournir des commentaires et des illustrations complémentaires. Cependant, il existe encore des zones d’incertitudes, telles que l’application du régime aux brevets en cours de délivrance, l’utilisation des déficits issus du résultat taxable au taux réduit sur le résultat taxable au taux de droit commun et inversement, ou encore la définition des dépenses de R&D à déduire, en particulier à l’entrée dans le nouveau régime.

Pour les PME ne sous-traitant pas leur R&D en intragroupe, ce nouveau régime devrait être à la fois attractif et relativement simple à mettre en place, à condition de pouvoir suivre les dépenses de R&D associées, par exemple via la documentation du Crédit d’Impôt Recherche. Pour les plus grands groupes, français ou internationaux, ce nouveau régime induit des obligations de suivi et de documentation supplémentaires qu’il convient dès maintenant d’anticiper, pour mettre en place les outils de suivi adéquats, simuler les impacts du changement législatif et définir une stratégie d’option pour le nouveau régime aussi optimisée que possible.