L’intervention du législateur vise à sécuriser la pratique des forfaits jours, étroitement contrôlée — voire malmenée - par la Cour de cassation depuis 2011. Rappelons en effet que depuis un arrêt du 29 juin 2011, la Cour de cassation exige que toute convention de forfait en jours soit prévue par un accord collectif d’entreprise ou de branche dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires. Nombreuses sont les conventions collectives de branche qui n’ont pas résisté à l’examen de la Haute Juridiction (Conventions SYNTEC, Commerce de gros, Chimie), exposant ainsi les employeurs à une demande de rappels de salaire au titre d’heures supplémentaires.
Il était donc indispensable que le législateur intervienne afin d’intégrer dans le Code du travail les recommandations formulées par la Cour de cassation. A présent, le législateur détermine de manière plus précise les clauses devant être introduites dans les accords collectifs afin d’assurer un contrôle régulier du caractère raisonnable de la charge de travail des salariés en forfait jours (évaluation et suivi régulier de la charge de travail — échanges périodiques sur la charge de travail du salarié, articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sa rémunération ainsi que sur l’organisation du travail dans l’entreprise). L’accord collectif doit également déterminer les modalités d’exercice du droit à la déconnexion des salariés.
De même et afin de sécuriser les conventions individuelles de forfait conclues sur la base d’accords collectifs incomplets en matière de suivi du temps de travail, la loi du 8 août 2016 permet à l’employeur, sous certaines conditions, de combler ces carences et de continuer à conclure des conventions individuelles de forfait jours. A cette fin, l’employeur devra veiller à l’établissement d’un document de contrôle attestant du suivi des journées ou demi-journées travaillées, s’assurer de la compatibilité de la charge de travail du salarié avec le respect des temps de repos légaux et organiser un entretien annuel avec le salarié afin d’évoquer des sujets précis sur l’exécution de son travail. De la même manière, en l’absence de dispositions conventionnelles relatives au nouveau droit à la déconnexion, ses modalités d’exercice seront définies par l’employeur et communiquées par tout moyen aux salariés concernés.
En dehors des précisions apportées en matière de suivi du temps de travail, rappelons que la loi du 8 août 2016 impose également aux accords collectifs mettant en place des conventions de forfait jours (ou heures sur l’année), de définir la période de référence du forfait et de déterminer les conditions de prise en compte des absences, des arrivées et des départs en cours de la période pour la rémunération des salariés. Ces clauses, purement techniques, ne s’imposent qu’aux accords collectifs conclus après la publication de la loi.